Yannick Chenet : les pesticides l'ont tué

Publié le par Fédération PRG de Charente-Maritime

Son ami Benoît Biteau, vice-président PRG du Conseil Régional témoigne de son combat dans les colonnes de Sud-Ouest . Benoît lui rend également hommage : YANNICK ETAIT MON AMI  (cliquer ici) sur le blog du PRG Poitou-Charentes.
 
sudouest.fr
18 janvier 2011 06h00 | Par thomas brosset  
Les pesticides l'ont tué

Yannick Chenet, viticulteur, s'est éteint des suites d'une leucémie que la Mutualité sociale agricole avait reconnue comme maladie professionnelle.

 Yannick Chenet, lors du tournage de « Severn ». photo DR
Yannick Chenet, lors du tournage de « Severn ». photo DR
Dans le film choc de Jean-Paul Jaud « Severn » (1), il témoigne de son calvaire aux côtés de Paul François, le « petit » agriculteur charentais intoxiqué aux pesticides et parti en guerre contre le géant américain Monsanto. Yannick Chenet y raconte le traitement de ses vignes puis sa leucémie, sa souffrance. Il y lâche notamment cette phrase terrible : « Les produits qui m'ont empoisonné et ceux qu'on me donne pour me guérir sont fabriqués par une seule et même firme. »

Le viticulteur s'est éteint samedi soir, après huit années de lutte contre cette « saloperie » de cancer ; il avait 43 ans. La Mutualité sociale agricole avait fini par reconnaître que sa maladie était bien liée à son activité professionnelle.

« Un courage exemplaire »

« Je l'avais encouragé à monter un dossier dans ce sens. Mais il a fallu attendre la première jurisprudence, en 2003, concernant un agriculteur de la Meuse, pour qu'il obtienne satisfaction à son tour », témoigne Benoît Biteau, vice-président radical de gauche du Conseil régional de Poitou-Charentes, éleveur bio et ami d'enfance de Yannick Chenet.

Le rejet de sa greffe de moelle a eu raison de ses dernières résistances huit ans après la déclaration de maladie. Le dossier de la MSA ne précise pas quel produit spécifique serait à l'origine de la maladie. Mais le benzène, fréquemment utilisé comme solvant ou diluant, est fortement suspecté. Yannick Chenet faisait partie, comme Paul François, du Mouvement pour le droit et le respect des générations futures, présidé par le conseiller régional de Picardie Pierre Veillerette.

« Parce qu'il avait dit ce qu'il pensait des pesticides, Yannick se sentait rejeté par le monde agricole. Il avait trouvé dans l'association un nouveau cercle social qui le comprenait », poursuit Benoît Biteau, évoquant le courage exemplaire de son ami, jusqu'aux derniers instants.

« Arrêtons le massacre. Nous avons le devoir de clamer haut et fort que notre terroir nous tue. On ne peut rester indifférent à la mort de Yannick et à toutes les autres qui vont venir. Refusons cette omerta dont s'accommodent la majorité des agriculteurs », s'insurge Jean-Paul Jaud, le réalisateur, actuellement en tournée dans toute la France pour commenter son film. Avant « Severn », le documentariste avait réalisé « Nos enfants nous accuseront ». « Parce que les victimes des produits phytosanitaires ne sont pas seulement les agriculteurs, mais également leurs enfants. Les témoignages se multiplient de petits garçons avec des malformations génitales ou de fillettes qui sont réglées à 5 ou 6 ans », poursuit le cinéaste, originaire de Marennes (17).

Rassemblement à Ruffec

Paul François, lui-même très atteint par l'intoxication dont il a été victime il y a six ans, poursuit le combat depuis sa Charente natale. « Je ne veux pas dire que Yannick est un martyr de notre cause. Mais comme son décès est l'un des tout premiers officiellement dus aux pesticides, il nous donne la force de nous battre au moins pour sa mémoire. »

À l'exemple des victimes de l'amiante, celles de l'agriculture intensive se regroupent, s'organisent. Ils étaient une trentaine lors du rassemblement national de l'an dernier, une centaine sont attendus les 18 et 19 mars à Ruffec (16). « Et le nombre de dossiers déposés à la MSA pour reconnaissance de maladie professionnelle est passé d'une quinzaine à plus de 100, en quelques mois. »

Les jurisprudences succèdent aux jurisprudences. D'une certaine manière, le décès de Yannick Chenet en est une de plus qui pourrait se résumer à une phrase : agriculteur-viticulteur ayant utilisé des produits avec du benzène pour traiter ses vignes, puis développé une leucémie mortelle en rapport avec cette activité.

 

(1) « Severn, la voix de nos enfants », de Jean-Paul Jaud, novembre 2010.

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